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Une chambre à soi

  • Photo du rédacteur: Sandie Carissan
    Sandie Carissan
  • 26 oct. 2024
  • 3 min de lecture

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Avant de partager cet article, j'ai longuement hésité. Non pas par peur de montrer une faiblesse, mais plutôt par la crainte de me dévoiler, en exposant une partie de moi-même que je protège. Pourtant, les émotions et sensations qui m'habitent sont indissociables de ma condition humaine et de mon identité professionnel. Elles sont des moteurs de ma réflexion et de mes actions.


Mon amour pour la vie, pour les personnes qui m'entourent, et ma passion pour la philosophie trouvent leurs racines dans cette sensibilité. Elle me permet de voir le monde avec une profondeur et une intensité qui nourrissent mon métier.


Ainsi, le sujet de l'angoisse que j'évoquais dans mon précédent article sur Heidegger, m'a donné l'envie de partager une réflexion plus intime.


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Depuis quelques années, je traverse des moments d'angoisse intenses qui surgissent sans prévenir et avec lesquels je cohabite. Ils m'ont, à un moment, conduite à me retirer du monde. Ce sont peut-être les mots de Blaise Pascal qui m'ont inspirée : "Tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne pas savoir demeurer en repos dans une chambre."


Il m'a semblé nécessaire de m'éloigner de l'agitation extérieure, presque par obligation. Cette frénésie, qui semble parfois engloutir les êtres, me faisait craindre de m'y perdre, de m'épuiser. J'avais besoin de prendre de la distance avec ce qui, à l'extérieur, semblait amplifier mes angoisses. C'est ainsi que je me suis retrouvée à chercher refuge dans cette "chambre". Ce lieu, qui m'a d'abord été imposé, est peu à peu devenu un espace où j'ai pu me protéger, m'écouter, me rencontrer et me comprendre.


Cependant, face à cela, je me trouve parfois en difficulté pour trouver un équilibre entre le repos et l'action. Comme les vagues qui se retirent avant de revenir sur le rivage, j'aimerais pouvoir naviguer naturellement entre l'introspection et la confrontation avec la vie. Pourtant, il m'arrive de me sentir inclinée vers une seule possibilité : le retrait.


J'éprouve un désir profond de "savoir faire avec differents rythmes", mais ce désir se transforme parfois en une tâche ardue. C'est là que réside le paradoxe : la vie m'inspire, elle me fascine, je l'adore mais elle est aussi douloureuse et difficile à habiter.


Ces violentes tachycardies qui surgissent, m'enfermant dans mon propre corps. Je me retrouve alors piégée dans une tempête intérieure que je ne peux maîtriser.

J'écris :


Le mal de vivre

me prend comme le mal de mer

mon cœur bat trop fort

mes pensées tournent trop vite


et j’ai peur

de tout vomir

je serre les dents

je ferme les yeux


mais ça ne s’arrête pas

les hauts-le-cœur me secouent

et je m’accroche à moi-même

piégée dans un corps

qui ne sait plus

comment respirer


je retiens mon souffle

j’attends que ça passe

mais ça revient

encore et encore



Ainsi, je connais (peut-être trop bien) mes refuges pour me restaurer et "demeurer en repos dans une chambre", comme le dit Pascal. Mais j’aime tout autant l'idée d'en sortir, de me confronter au monde et à ses défis.


Face à cela j'ai posé un choix. Une façon de m'abandonner à vivre, en décidant de pratiquer cet Amor Fati dont parlait Nietzsche, ce grand "OUI" à tout ce qui est, un engagement à embrasser la totalité de la vie – ses joies comme ses souffrances.


Incarner une esthétique de l'existence, c'est accepter de façonner sa propre vie, où chaque expérience, heureuse ou douloureuse, contribue à la beauté de l'ensemble. Dans cette esthétique de l'existence, il y a une affirmation de soi, un engagement total à vivre.


Et c'est pour cette raison que j'ai créé le MOUVEMENT OTIUM, en puisant la force de créer à partir de mon expérience.


C'est là que je trouve, au sens de Virginia Woolf, cette "chambre à soi"*. Un espace qui, bien qu’au départ imposé par la nécessité, s'est révélé être l’endroit où je pouvais découvrir et façonner ma propre manière de donner un sens à ce que je traverse.



*Lorsque Virginia Woolf évoque une "chambre à soi", elle fait référence à un espace intérieur où l'on peut réfléchir, créer, et se retrouver, à l'abri des interruptions imposées par les obligations et les attentes sociales.



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